D'un point de vue sylvicole, le regard du forestier

L'éclaircie a essentiellement un rôle de sélection, qui se fait en priorité au profit de la qualité des arbres par rapport à leur utilisation potentielle.

En futaie régulière, on oriente préférentiellement le choix sur les dominants, les plus vigoureux, ou à défaut des codominants*, de façon à obtenir le plus rapidement possible, un peuplement homogène en fin de cycle* avec des arbres au diamètre d'exploitabilité recherché. Cela signifie que l'on conserve des individus à forte surface foliaire individuelle.

Pour favoriser des dominants et codominants, il faut faire de la place à leur niveau, donc enlever en priorité des dominants ou codominants concurrents.

Les dominés sont récoltés en une ou plusieurs fois selon les itinéraires choisis par les praticiens, parfois pour homogénéiser le peuplement ou pour faciliter l'exploitation des plus gros. Ils participent aux revenus intermédiaires. Toutefois, s'ils ne gênent pas les autres arbres, ils peuvent être conservés assez longtemps.

D'un point de vue hydrique

En l'absence de déficit hydrique, la transpiration des arbres augmente proportionnellement à l'indice foliaire du peuplement jusqu'à un indice foliaire qui engendre une saturation pour la consommation en eau* (seuil proche d'un indice foliaire de 6-7 m²/m²) : cette limite correspond à la consommation de l'évapotranspiration potentielle, donc de la demande climatique... (Voir Fiche G, Figure 1 (Granier, 1999)).

On a ainsi intérêt à maintenir l'indice foliaire en dessous de ce seuil de saturation, qui correspond à un peuplement plus ou moins entrouvert, ce qui se fait habituellement en prélevant des arbres par les éclaircies.

Attention toutefois à ne pas provoquer l'isolement des arbres et à créer un couvert discontinu.

Quels types d'arbres enlever préférentiellement dans cette optique ?
Les études conduites sur la transpiration individuelle des arbres en peuplements réguliers aux couverts fermés dans différents niveaux de densité montrent de fortes différences en fonction de leur statut social (Voir  Fiche G).

Du point de vue hydrique, ces différences sont la conséquence directe du fait que la transpiration individuelle est proportionnelle à la surface foliaire totale de l'arbre et dépend des conditions de demande climatique (rayonnement, température et humidité de l'air).
Les différences de surfaces foliaires totales et de sa proportion exposée à la lumière expliquent donc pourquoi les dominants transpirent plus que les codominants ou les dominés en condition de bonne alimentation en eau (Voir  Fiche G).

L'élimination d'arbres dominants ou codominants aura donc un impact nettement plus positif sur le bilan hydrique que l'enlèvement de dominés. Dans ce raisonnement, le choix des arbres à ôter en éclaircie repose sur la surface foliaire totale de l'arbre et sur sa proportion exposée à la lumière.

Implications sylvicoles

Lors des éclaircies dans des peuplements fermés, l'amélioration du bilan hydrique est plus efficace en supprimant des arbres de la strate arborée dans l'étage principal (dominants et codominants) qu'en enlevant des dominés.

Toutefois pour que l'éclaircie soit efficace, il faut que l'indice foliaire du peuplement après éclaircie corresponde à un peuplement entrouvert, c'est-à-dire que l'indice foliaire soit ramené en dessous du seuil de 6-7 m²/m² qui sature la consommation en eau (Voir Fiche G, Figure 1 (Granier, 1999)).

Ceci à pour avantage de répondre dans le même temps aux attentes du sylviculteur :
  =>   Maintien d'une bonne croissance sur les arbres de la strate arborée restant dans l'étage principal, avec la possibilité d'obtenir des diamètres d'exploitabilité plus vite qu'avec les dominés
  =>   Meilleure réaction à l'éclaircie du peuplement
  =>   Meilleures opportunités de commercialisation des bois
  =>   Possibilité de conserver des dominés : atteinte de dimensions commerciales, maintien d'un certain couvert au sol, ombrage des troncs des dominants...

Mise en garde

Le meilleur compromis est donc de continuer à préconiser des éclaircies par le haut au profit des meilleures tiges, tout en conservant des dominés non gênants.

Attention !
Le raisonnement vis-à-vis du bilan hydrique sur le choix des arbres lors du martelage d'une éclaircie se place au niveau global du peuplement. La question sur une plus ou moins bonne sensibilité individuelle au stress hydrique des arbres dominants par rapport aux dominés est beaucoup plus complexe et n'est pas traitée ici.